Actualité initialement diffusée le 20/09/2022 - Rediffusion le 20/11/2024
Pour cette Semaine mondiale des Sourds, la WFD (Fédération mondiale des Sourds) a dédié un thème à chaque jour de la semaine. Pour cette journée du mardi 20 septembre, le thème est : « Opportunités économiques durables pour les personnes sourdes ».
Nous savons combien il peut être difficile de se faire embaucher en entreprise en tant que sourd, tout comme y travailler à long terme, en fonction du confort et des mesures d'adaptation mises en place. Nous avons interviewé Marylène Charrière, conseillère en insertion professionnelle (CIP), qui nous présente cinq conseils pour une meilleure insertion en entreprise.
Interview de Marylène Charrière
Premièrement, il est important d'accepter un choc culturel. La personne salariée sourde est issue d'une communauté qui possède sa propre culture. Il s'agit d'une culture majoritaire contre une culture minoritaire, induisant un choc culturel qu'il faut reconnaître et accepter.
Deuxièmement, concernant son propre vécu, son quotidien, je ne conseille pas de le négliger devant une majorité entendante, en préjugeant de leur incompréhension et de l'inutilité de raconter notre vie. Je pense qu'il est préférable de s'exprimer et de s'ouvrir un peu, car dans la majorité des cas, le poste de travail occupé ne correspond pas aux responsabilités occupées dans sa propre vie ou les associations.
Il arrive parfois que ces responsabilités soient nettement plus importantes que dans l'entreprise. Il est vraiment dommage que les collègues et employeurs ne soient pas au courant de tout cela, c'est pourquoi il est préférable de raconter que l'on est, par exemple, président d'une association, ou que l'on a organisé un événement ou de montrer son classement au sport...
Troisièmement, concernant la résilience, dont voici le signe, étant soi-même sourd au sein d'une majorité dans le cadre professionnel, s'insérer n'est jamais simple. On a constamment en tête des stratégies d'adaptation, on supporte la situation en se disant que c'est normal, on a grandi ainsi et ce n'est pas nouveau, on prend sur soi pour avancer. C'est une sorte de carapace qu'on endosse pour tolérer cela. Le mot « résilience » est rarement utilisé par les entendants, il possède une grande valeur à leurs yeux. Si une personne sourde réussit à signaler sa résilience, on peut être assuré que cela va frapper les personnes entendantes. C'est ce qui va donner vraiment conscience pour un regard plus respectueux.
Quatrièmement, le salarié sourd omet souvent ses difficultés et reste dans le flou. Or il faut les exprimer clairement, exposer ses vrais besoins. Parfois, l'employeur met en place la palette complète du dispositif d'accessibilité pour la personne sourde, interprète, centre relais, reconnaissance vocale, tout ce qu'il peut trouver. Cependant, il faudrait suivre les souhaits de la personne par rapport à son poste de travail et son environnement. Comme la disposition de la table par rapport à la fenêtre, la communication envisagée avec le collègue faisant face, ainsi qu'un dispositif d'accessibilité en sus.
Cinquièmement, ce point englobe justement les quatre points précédents que nous avons vus et il est d'une importance capitale. Il s'agit de la forme de prise de décision. Il faut garder des traces écrites de divers accords passés, dans le but d'éviter une charge mentale au seul salarié sourd, qui doit constamment penser à expliquer ou à sensibiliser à chaque fois qu'un départ ou un relais de personne a lieu. Il ne comprend pas ces changements, alors que tout se passait bien auparavant. C'est parce que des personnes ont oublié ou n'étaient pas au courant. C'est pourquoi la forme de prise de décision doit être actée très clairement. Lister les besoins pour l'interprétation et la procédure à suivre. Lister les besoins pour la disposition du bureau, etc. Il faut expliciter l'ensemble, le noter et le garder enregistré. Lorsqu'il y a un changement de personne, ce dossier est prêt et peut alors être transmis.
L'objectif de ces conseils passés en revue est d'obtenir une qualité de vie au travail, c'est essentiel.
Une vidéo de la rubrique « Droits & Combats »
